La consommation d’alcool responsable avec Ariel Charest et Michelle Houde


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Ariel Charest et Michelle Houde

TRANSCRIPTION

Durée de l'enregistrement : 35:02

Anne-Élisabeth : [00:00:00] Salut tout le monde! Je m'appelle Anne-Élisabeth Bossé et bienvenue au balado de Beneva : Ça arrive à tout le monde. Parce que Beneva, c'est vraiment du bon monde, on s'est fait aller le réseau de contacts pour créer des rencontres mémorables. À chaque épisode, je reçois un ou une invitée pour jaser de ce qui arrive dans sa vie.

[00:00:17] Est-ce que ça vous arrive de réfléchir à votre consommation d'alcool? Avez-vous déjà pensé à arrêter complètement ou ça sonne super farfelu à vos oreilles? Êtes-vous du genre à l'échapper une fois de temps en temps, à boire un peu trop, ou vous savez toujours quand vous arrêter au bon moment? Boire, ça fait partie de notre culture, mais on assiste de plus en plus à un courant social de gens qui s'intéressent à, disons, une consommation consciente ou une sobriété curieuse.

[00:00:38] Pour en jaser, je reçois la comédienne Ariel Charest qui, récemment, a décidé de revoir sa relation à l'alcool, ainsi que la médecin résidente Michelle Houde, aussi connue sur les réseaux sociaux comme la MD colorée qui se penche sur la médecine préventive.

[00:00:51] On part ça.

[transition]

Anne-Élisabeth : [00:00:59] Ariel Charest, comédienne formidable. Merci tellement d'être là.

Ariel : [00:01:03] Mais mon Dieu, merci à toi.

Anne-Élisabeth : [00:01:04] On te connaît pour tes centaines de lipsync que tu nous…

Ariel : [00:01:07] Oui, je commence à en avoir plusieurs à mon actif, effectivement.

Anne-Élisabeth : [00:01:12] Pour notre plus grand plaisir. On t'a vu dans la websérie Sur la trace, on te voit Sur les planches, on te voit dans Léo et, aujourd'hui, on est là pour parler de… tu as fait le défi 28 jours sans alcool.

Ariel : [00:01:20] Oui.

Anne-Élisabeth : [00:01:21] Tu étais ambassadrice.

Ariel : [00:01:22] Oui.

Anne-Élisabeth : [00:01:23] Et c'est ça un peu qui t'a poussée à revoir ta relation avec l'alcool?

Ariel : [00:01:26] Oui, effectivement. Il y a comme eu une conjoncture où j'ai été appelée à être ambassadrice et je faisais un show aussi de théâtre qui s'appelle S'aimer ben paquetée, de Cristina Moscini, qui porte sur les déboires de l'autrice et son chemin vers la sobriété. Fait que tsé, on dirait que tout allait dans la direction où je… et moi-même, dans une quête personnelle sur la question, fait que ça a fait « Eille, c'est peut-être cette année que je vais réellement faire la vraie introspection de me poser la question : Bon, où c'est qu'on en est avec la consommation d'alcool et quelle place ça prend dans ma vie? »

Anne-Élisabeth : [00:02:05] Oui, elle en prend une grosse place finalement. Le constat de ça. Oui.

Anne-Élisabeth : [00:02:07] Je comprends. C'est vrai que quand on est approché pour être ambassadeur, on a le goût de prendre ça au sérieux. Quand on joue au théâtre, on se plonge pendant des semaines. Donc, ça a fait son chemin. C'est la vie. On dirait que les planètes se sont un peu alignées pour que tu te plonges là-dedans.

Ariel : [00:02:19] Bien oui.

Anne-Élisabeth : [00:02:20] Tu as quel âge, si c'est pas indiscret?

Ariel : [00:02:21] J'ai 33 ans.

Anne-Élisabeth : [00:02:21] Bien, si tu es à l'aise, quel genre de buveuse étais-tu? Parlons au passé.

Ariel : [00:02:25] Oui, parlons au passé. Bien, c'est un passé qui est assez près quand même. C'est ça aussi, il faut que je reste aux aguets.

Anne-Élisabeth : [00:02:31] Oui, oui. On n’est pas ici pour se dire qu'on a mis une boucle sur la…

Ariel : [00:02:33] On n'est pas ici pour dire que c’est la rédemption.

Anne-Élisabeth : [00:02:33] C'est ça.

Ariel : [00:02:34] On est peace avec ça. Vraiment pas. On est en toute humilité.

Anne-Élisabeth : [00:02:37] Ah, l'alcool jadis.

Ariel : [00:02:39] Oui, c’est ça.

Anne-Élisabeth : [00:02:39] Non, non, c'est ça, c'est pas ça.

Ariel : [00:02:40] J'étais une fille quand même de party très tôt dans ma jeunesse, à 15-16 ans, venant de région également, sortir dans les bars.

Anne-Élisabeth : [00:02:48] Tu viens d'où déjà?

Ariel : [00:02:48] Saint-Félicien, Lac-Saint-Jean. Alors tsé, on n'a pas attendu 18 avant de mettre le pied dans une discothèque.

Anne-Élisabeth : [00:02:55] Je crois bien que non.

Ariel : [00:02:56] Aussi, la posture que j'avais dans le groupe de mes amis, la fille qui, bon, rassemblait, est un petit peu co-clown, dépassait toujours la limite. Puis, on riait de ça. C'est ça aussi. Il y avait personne qui était comme « Maudit, Ariel, il faut encore la ramasser ». C'était comme commun. C'était devenu le running gag que, Ariel, elle se foule une cheville, que ah oui, il est 9 h, il faut aller la coucher. Tsé, que le black-out arrivait aussi assez rapidement. Fait que c'est ça. J'étais quand même une bonne buveuse aussi, dans le terme de je contenais beaucoup. Tsé, moi, une douze, ça rentrait quand même bien.

Anne-Élisabeth : [00:03:35] Moi, je suis un tank. Je comprends.

Ariel : [00:03:37] Fait qu’il y a ça aussi.

Anne-Élisabeth : [00:03:38] Je peux tinquer en tabarnouche. Oui.

Ariel : [00:03:38] Tu avais mes chums de filles, deux Redbull-vodka. « Eille, wô là! » Puis là, tsé moi, huit Black Label, puis je suis encore debout. Fait qu'il y avait ça aussi qui n'aidait pas dans tout ça. Puis ça, ça s'est continué toute ma vingtaine, même début… bien récemment, on parle de, je sais pas là, trois-quatre ans là, que c'était encore ça un petit peu.

Anne-Élisabeth : [00:04:01] Sais-tu, penses-tu que, ce qui entretient cette affaire-là ou qui l'exacerbe, c'est le fait que c'est le rôle qu'on nous attribue et qu'on pense qu'il faut reprendre à chaque fête.

Ariel : [00:04:10] Oui. Bien je pense que oui.

Anne-Élisabeth : [00:04:11] Même si un soir, on aurait voulu peut-être avoir la pédale sur le frein, il y a de quoi avec le conditionnement social de ce qu'on a nous-même créé et que peut-être même personne nous exige à reprendre.

Ariel : [00:04:19] Oui.

Anne-Élisabeth : [00:04:20] Il y a cette affaire-là de : je suis de même, c'est moi ça! J'ai pas le choix.

Ariel : [00:04:22] Bien, absolument. Puis, c'est ça, on le voit surtout aussi dans des vieux groupes d'amis. Tsé que, admettons, on s'éloigne, puis là on se retrouve. Tu reprends ta place.

Anne-Élisabeth : [00:04:32] Tout le temps.

Ariel : [00:04:33] Instinctivement, c'est : tout le monde reprend son rôle, tout le monde revient dans ses zones connues. Donc oui. Puis même quand tu veux faire autrement, tu te le fais dire. « Ah là, tu es bien plate, qu'est-ce que tu as? Ça va pas? » « Mais non, ça va. Ça va très bien. J'essaie justement qu'on me ramasse pas ce soir, tsé ». Puis des fois, je me donnais des trucs, tsé. Ah, je pourrais être la chauffeuse désignée, ça va m'aider, ça.

Anne-Élisabeth : [00:04:54] Tu essayais de te tricker.

Ariel : [00:04:55] Finalement, qu'est-ce qu'elle fait, la fille? Elle laisse parquer son char dans le parking du bar. Tsé? Fait qu’il y a tout ça là, tsé, tu comprends. Et là, à un moment donné, c'est drôle, c'est drôle. Oh! On rit moins. Oh là, j'ai une petite culpabilité des lendemains de veille qui sont plus difficiles. Fait qu'à un moment donné, tu ne trouves plus ça drôle pour toi-même, puis tu sens aussi que les gens, tsé, à un moment donné, le party n'est plus le point central de nos vies, tsé.

Anne-Élisabeth : [00:05:22] Non, c'est ça. Organiser son horaire autour d'être hangover, là.

Ariel : [00:05:25] Oui, c’est ça.

Anne-Élisabeth : [00:05:25] Je peux être hangover mardi. Super! Fait que lundi, je vais en virer une parce que j'ai le luxe de me lever comme pas avant 10 mardi.

Ariel : Oui, voilà.

Anne-Élisabeth : Inconsciemment là, de se faire des pits à party dans notre iCal.

Ariel : [00:05:35] Absolument.

Anne-Élisabeth : [00:05:37] Oui, je comprends. Moi, ça a commencé jeune aussi l'idée de… Je pense que ça rassure le monde sur leur propre consommation, qu'il y en a un qui dérape tellement clairement, ça fait que tout le monde n'a pas à se pencher sur ses petits écarts. Eille, il y a le père fondateur de la beuverie qui est là, fait que nous autres, on est donc bien correct, tsé.

Ariel : [00:05:51] Bien, absolument. Puis je dirais même qu'il y a une petite variation sur le fait d'être une femme.

Anne-Élisabeth : [00:05:57] Tellement!

Ariel : [00:05:58] C'est, tsé, admettons c’est ça, Johnny qui est sur la table « hééé!... », tsé. « Haha! », ça c'est comme, ça reste tout le temps drôle. Même encore à ce jour, un espèce…

Anne-Élisabeth : [00:06:07] C'est long avant que ce ne soit plus drôle., un homme. C'est long. Une fille, c'est pas si long.

Ariel : [00:06:11] Et que c'est… oui, oui. Tu sens les regards, tu sens que c'est un petit peu déplacé, c'est un peu…

Anne-Élisabeth : [00:06:17] C'est vulgaire.

Ariel : [00:06:19] C'est vulgaire.

Anne-Élisabeth : [00:06:19] C'est facile. Ça fait fille facile.

Ariel : [00:06:20] Oui. Puis c'est ça, avec le spectacle de théâtre que j'ai fait, on s'est beaucoup questionné là-dessus. Sur cette vision-là, puis cette tendance aussi aux femmes à se cacher de ces problèmes d'alcool là, d'alcoolisme. Tsé, la fameuse mère qui se cache un petit vin rosé dans sa bouteille, puis « envoye les kids ». Tsé, il y a comme de quoi aussi de plus…

Anne-Élisabeth : [00:06:43] Oui, le monsieur, il prend sa bière devant tout le monde, devant la TV. La femme, elle a la petite bouteille cachée dans le… Oui, oui. On dirait que quand on passe la fille de party… Tu connais-tu la toune Chandelier de Sia?

Ariel : [00:06:55] Mon Dieu.

Anne-Élisabeth : [00:06:55] C'est une toune sur l'alcoolisme.

Ariel : [00:06:56] Ah oui, hein?

Anne-Élisabeth : [00:06:57] One, two, three, one, two, three, drink, I'm gonna swing on the chandelier. Je vais encore l'échapper à soir. Tu veux un good time? Tu m'appelles moi. Mais les lendemains, par exemple, qui c'est qui est là pour me…

Ariel : [00:07:05] Je me suis pas assise pour regarder les lyrics, mais effectivement, c'est très clair, là.

Anne-Élisabeth : [00:07:10] Oui, c'est ça. Fait qu’à un moment donné, on a l'image justement de la fille qui est toujours suspendue au chandelier, au plafonnier, puis c'est ça, elle danse. Puis à un moment donné, il y a la honte. Puis à un moment donné, il y a la cachette. Fait que je sais pas exactement la limite d'âge où ça devient, comme, c'est une étiquette versus c'est mon démon caché, tsé.

Ariel : [00:07:30] Oui. Puis moi, ce que je trouve aussi paradoxal là-dedans, c'est de vouloir s'extirper, puis de vouloir vraiment… tsé, d'avoir l'écœurantite de ça, mais en même temps d'y retourner constamment parce que c'est une zone étrangement agréable et confortable, le mal être, l'espèce de complaisance là-dedans.

Anne-Élisabeth : [00:07:49] Ah oui! S'attacher à sa douleur un peu, là? Oui.

Ariel : [00:07:52] Moi je suis un peu… je suis assez de même là, tsé. Nourrir cette mélancolie.

Anne-Élisabeth : [00:07:55] Mais moi, c’est parce que je juge les grands positivistes aussi, là, les petits McCain là, moi ça me gosse, fait que je me range un peu du côté des morbides.

Ariel : [00:08:02] Oui, on est dans la même zone. Oui effectivement, moi itou, il y a bien ça. Puis tsé, je me suis mise aussi à boire seule sur mon balcon. Tsé, il y a comme de quoi là dedans aussi. Quand tu commences à boire seul des grosses quantités, de te coucher vraiment… tsé, je me rappelle pas quand est-ce que je suis allée mettre mon pyjama. Puis encore là, je l'ai-tu mis, tsé?

Anne-Élisabeth : [00:08:24] Le black-out, là.

Ariel : [00:08:25] Le black-out.

Anne-Élisabeth : [00:08:26] Quand le black-out apparaît, là, oui, ça, la game vient de changer, je trouve.

Ariel : [00:08:30] Le vieux fond de vin rouge croûté à côté. Ah! C'est voyons, qu’est-ce que c'est ça!

Anne-Élisabeth : [00:08:36] Ou la Mc Croquette sur l'oreiller.

Ariel : [00:08:38] Oui, oui.

Anne-Élisabeth : [00:08:39] Ça, malheureusement, je peux pas dire que ça m'est pas arrivé.

Ariel : [00:08:41] Beaucoup de McDo et beaucoup de croquettes.

Anne-Élisabeth : [00:08:44] Ce qui amène, c'est ça, doublement la honte.

Ariel : [00:08:47] Oui.

Anne-Élisabeth : [00:08:48] Puis l'anxiété liée à l'ivresse. C'est ça, comme, comment tu t’es mis à vivre tes lendemains. Le fameux mot hangxiety pour hangover et anxiété qui sont combinés. Est-ce que c'est quelque chose...?

Ariel : [00:08:59] Tu connais beaucoup de choses, comme des termes comme ça.

Anne-Élisabeth : [00:09:02] Bien, ça m'intéresse.

Ariel : [00:09:03] Non, mais non, mais c'est…

Anne-Élisabeth : [00:09:05] Mais, ça m'intéresse.

Ariel : [00:09:05] Bien, je comprends.

Anne-Élisabeth : [00:09:06] Parce que c'est un peu… je veux pas te voler ton contenu, mais c'est un peu ma recherche d'équilibre aussi. Entre l'abstinence et la beuverie, existe-t-il? Je n'ai toujours pas de réponse, mais je cherche ma place là-dedans. C'est pour ça que je peux aussi bien en jaser avec toi, puis je me permets d'être authentique aussi, parce que ça me parle, tsé.

Ariel : [00:09:22] Bien oui, il faut. Oui, oui. Oui, oui. Bien, c'est ça. L'anxiété qui, encore une fois dans cette perpétuelle ironie de « je suis anxieuse, donc je bois pour calmer cette anxiété-là », mais là, je bois trop. Tsé, l'état de sérénité, de plénitude est tellement mince et tellement de courte durée, puis que là, rapidement tu reviens, puis là tu te réveilles. Même dans la nuit, ça me réveillait, de mal, de… Ah mon Dieu, j'ai envoyé un mémo vocal beaucoup trop long, beaucoup trop… Puis, je pense que j'ai de la misère aussi beaucoup avec la vulnérabilité, d'être vulnérable dans la sobriété, moi dans la vie. Et donc, tous ces moments où j'ai dit aux gens que je les aimais, ça prenait une swing. Puis ça, je suis tannée de toujours le dire les yeux mouillés, un peu de d'écume sur le bord. J'étais un peu fort. Je suis tannée de ça.

Anne-Élisabeth : [00:10:17] Je t'entends. On s'automédicamente avec ça jusqu'à, c'est ça, qu'on devienne la conséquence de ça. Puis ça devient la médecine aux problèmes, puis c'est ça, c'est comme un cercle sans fin.

Ariel : [00:10:28] Oui, puis évidemment - mon Dieu, j'ai mué – évidemment que l'alcool, tu te rends compte aussi que c'est le symptôme de quelque chose qui est beaucoup plus profond, beaucoup plus… C'est ça, là, tsé, viscéral, pogné aux tripes. Puis de se plonger là-dedans, de faire le saut réel d'aller voir, je veux dire, mais comment faire autrement que d'éviter ça? Tsé, pourquoi j'irais là? Pourquoi, enfin, je réglerais mes problèmes? Puis, ça revient aussi à cette complaisance-là de la douleur, d'être écœurée par le bonheur. Moi, il y avait ça à un moment donné, là. Tsé comme tu parlais là, les positivistes, puis le self-care, voyons, ça m'énervait.

Anne-Élisabeth : [00:11:09] Mon corps n'est dont pas un temple. Hé! que je voulais pas que ce soit un temple.

Ariel : [00:11:11] Non, non, non.

Anne-Élisabeth : [00:11:13] Moi aussi, non, je comprends, j'aimais ça me grafigner un peu.

Ariel : [00:11:17] Oui.

Anne-Élisabeth : [00:11:18] Puis la grande peur du plate, hein? Comme une vie de sobre, on dirait qu'on a l'impression que… Mais c'est pas ce que je recherche, mais je pense que ça, c'est un préjugé que j'ai. Je trouve quelque chose de faux aussi dans les gens qui s'identifient seulement à leur sobriété, qui vont donc bien que depuis qu'ils ont arrêté de boire, puis que c'est donc bien l'épiphanie. Puis tsé, je cherche pas ça non plus, mais je ne veux plus les bas fond.

Ariel : [00:11:37] Admettons qu’on parle de sobriété complète, ça me fait peur. Je suis terrorisée à me dire disons, à partir d'aujourd'hui, tu ne bois plus jamais une goutte. C'est sûr que je vais pas le tenir. C’est trop effrayant.

Anne-Élisabeth : [00:11:47] Ah bien moi, j’ai le focus facile là-dessus. Si tu me dis ça, ça va être...

Ariel : [00:11:50] Puis, c'est pas authentique, encore une fois. Puis c'est pour ça qu'on dirait que depuis, bon, le fait que j'ai été ambassadrice et tout ça avec le théâtre aussi, puis que je me suis réellement posé la question, là je sens enfin que c'est accroché. Ça a comme pogné une petite zone en dedans que je veux pas lâcher là. Parce que là, je sens que c'est vrai.

Anne-Élisabeth : [00:12:10] Tu touches à de quoi, là.

Ariel : [00:12:10] Je me mens pas à moi-même en voulant véritablement changer les choses. Je veux pas le voir linéaire, je veux pas le voir avec une ligne d'arrivée. Puis comme tu dis, tu es sobre « eille ça va bien » tsé. Non, non.

Anne-Élisabeth : [00:12:24] On se cache derrière cette étiquette-là aussi.

Ariel : [00:12:26] Non, c'est ça, il y a d'autres choses à gérer de beaucoup plus dense que cette affaire-là. Puis je veux que ça soit en mouvance. Je veux aussi être plus connectée à l'instinct, plus connectée à mes envies, puis de voir, tsé, si j'ai envie de prendre un petit verre de rouge parce que je le sens, je me sens bien, j'ai envie, c'est bon. Avec mon petit steak, frites.

Anne-Élisabeth : [00:12:50] Mais oui, mais c’est bon aussi, on va se le dire, là.

Ariel : [00:12:52] Bon, je veux pas me sentir coupable.

Anne-Élisabeth : [00:12:53] Je comprends. Que ce soit organique aussi, mais que ce ne soit plus une réponse, un band-aid à quelque chose.

Ariel : [00:12:59] Non.

Anne-Élisabeth : [00:13:01] Mais moi, je pense aussi qu'on a passé l'étape d'être sur la défensive par rapport à l'alcool. Le voyons donc. Parce qu'on avait… tsé là, j'aimerais ça que tu me parles de l'image qu'on a de l'alcoolique, tsé là, parce que c'est tellement facile de s’identifier à ça, parce qu'on a associé l'alcoolisme à, admettons.

Ariel : [00:13:16] Bien oui, c'est ça, la vieille robineuse.

Anne-Élisabeth : [00:13:19] Le 40 onces dans le sac en papier, la tuque ouverte, tsé, qui a plus de top là, puis oui., oui.

Ariel : [00:13:24] Oui, puis c’est ça.

Anne-Élisabeth : [00:13:25] Le baril de feu, là, tsé, on pense que c'est ça, là.

Ariel : [00:13:27] Tu rentres à la job, là, la gueule de bois, ça sent la robine partout.

Anne-Élisabeth : [00:13:30] Mascara icitte.

Ariel : [00:13:32] Tsé, c'est ça. C'est parce qu'à un moment donné, c'est dur de dire : c'est-tu un problème? Parce que, bon, je suis pas dans la rue, j'ai un travail, j'ai des amis, je suis fonctionnelle. Quand est-ce que ça a réellement un impact dans ma vie? Quand est-ce que je décide que là, ça rentre dans quelque chose de… ça prend beaucoup de place, tsé. Fait que c'est ça. Même ça, c'est dur de se l'avouer, d'avoir l'humilité de le nommer, puis de s'avouer ça. Il y a quelque chose qui est très confrontant là-dedans. On le nomme pas là, mais je pense qu'on est beaucoup, beaucoup de personnes dans cette même affaire-là. Fonctionnels, on est smattes, ça va bien, mais.

Anne-Élisabeth : [00:14:13] Il y a le côté no-future aussi. Hé! La planète est en train de brûler, on va quand même pas capoter. Tsé, le faire pour des raisons extérieures, ça accroche pas. Mais comme tu dis, quand il y a un petite ancrage intérieur de pour soi, il y a peut-être un début d'amour de soi aussi. Hé mon Dieu! Serais-tu capable de voir, entrevoir ça, tsé.

Ariel : [00:14:30] Puis c'est ça, c'est de ça que ça parle aussi. L'amour de soi. Hé, mon Dieu! C'est pas fait.

Anne-Élisabeth : [00:14:36] C'est pas fait.

Ariel : [00:14:37] Cette pas fait, Anne-Éli, je peux te le dire, là.

Anne-Élisabeth : [00:14:38] Non, mais j'adore qu'on soit capable d'en parler à cette étape-ci. C'est tellement plus facile quand c'est un beau petit dossier réglé, refermé, on est comme dans quelque chose, on est en plein process, tsé, c’est ça.

Ariel : [00:14:48] Ça va être une quête perpétuelle, ça va être un long pèlerinage, puis je le sais. J'ai pas envie en fait que ça s'arrête, cette affaire-là. On va jamais aller au bout de ça. On va toujours aussi avoir d'autres obstacles, d'autres cheminements qui vont arriver, puis ça va jamais s'arrêter. Fait qu’il faut pas… c'est ça, il faut que je le voie, que je l'entrevoie comme un, pas un mode de vie, mais en tout cas, quelque chose qui…

Anne-Élisabeth : [00:15:11] Bien, intégré dans nos pensées quotidiennes. Oui, comme intégrées dans nos garde-fous à bâtir constamment. Refaire un petit ciment de garde-fou.

Ariel : [00:15:21] Oui, absolument. Puis de changer nos réponses. Parce que juste ça...

Anne-Élisabeth : [00:15:24] Oui! Changer nos réflexes, oui, oui.

Ariel : [00:15:25] Nos réflexes, ça change toute la perspective, puis les autres autour de nous aussi, de comment ils répondent à ça.

Anne-Élisabeth : [00:15:32] Mais ce qui est beau, c'est qu'on assiste quand même… on en parle de plus en plus, c’est de moins en moins tabou. Puis oui, on en voit des gens qui s'intéressent à la sobriété, qui en parlent. C'est plus si glorifié non plus, boire. Bien que le vin nature, puis ça paraît bien, puis tout ça. C'est quand même de plus en plus toléré, de parler de sobriété.

[00:15:50] Je pense que c'est un très bon moment pour accueillir notre prochaine invitée, la médecin résidente Michelle Houde, aussi connue sur les réseaux sociaux comme la Md colorée. Michèle, joins-toi à nous!

[transition]

Anne-Élisabeth : [00:16:00] Michelle, médecin résidente, mais surtout Md colorée sur TikTok. Merci tellement d'être là.

Michelle : [00:16:06] Merci de me recevoir, Anne-Élisabeth, comédienne.

Anne-Élisabeth : [00:16:11] Ariel, comédienne, médecin résidente. Bien, écoute, d'emblée, qu'est-ce que tu penses de ce mouvement qui questionne notre relation à l'alcool?

Michelle : [00:16:18] Je trouve ça fort intéressant. Moi aussi, j'ai une relation à l'alcool qui débute assez tôt parce que je n'ai pas bu avant très tard dans ma vie.

Anne-Élisabeth : [00:16:26] Ah bon!

Michelle : [00:16:25] J'étais la seule de mon groupe d'amis pendant longtemps qui buvait pas…

Anne-Élisabeth : [00:16:31] Ça t'intéressait pas.

Michelle : [00:16:32] Parce que j'avais un peu peur de ça, en fait. J'aimais pas voir comment l'alcool transformait les gens. Moi, j'avais du plaisir avec mes amis, disons, telles qu'elles étaient. Puis les changements que l'alcool amenait, moi ça me faisait peur. Pendant longtemps, j'avais un espèce de blocage. Et puis, ça m'a amené beaucoup d'isolement, où je me suis sentie rejetée. Au secondaire, au cégep, je connectais moins dans les groupes d'amis parce que…

Anne-Élisabeth : [00:16:56] Mais j'imagine, hein! Une grosse période de beuverie, ça.

Michelle : [00:17:00] C’est ça. Les soirées étaient tout autour de l'alcool, donc moi, souvent je j'y participais pas. Donc puis éventuellement, bien, j'ai un peu réglé ce conflit interne parce que c'est sûr que, pas consommer d'alcool, c'est jamais mal. Mais moi, j'étais pas bien avec ça parce qu’on dirait que je m'excluait. Là, j'ai réconcilié ça, donc je consomme de l'alcool de manière relativement raisonnable. Jusqu'à l'été passé où j'ai réalisé que j'avais commencé à prendre l'habitude de prendre un verre de vin toute seule chez nous. Et j'étais dans une période un peu stressante, puis ça me faisait du bien. Et à certains moments, quand j'avais plus de vin chez nous et là, la journée de travail finissait puis j'étais un peu stressée, ça me manquait.

Anne-Élisabeth : [00:17:45] Hé hein! Plus pernicieux.

Ariel : [00:17:49] Je comprends où ça s’en va tranquillement. Oui, oui.

Michelle : [00:17:50] Et là, j’ai réalisé, je pense que c'est un des aspects, c'est important de réaliser les petits drapeaux rouges, je me suis dit : il y a un petit drapeau rouge qui commence. Alors j'ai arrêté de boire pendant un bout, juste pour m'assurer que je détachais mes émotions de la consommation d'alcool. Tantôt, je vous entendais parler de consommer pour le plaisir sans me culpabiliser, mais dans un bon état d'esprit. Je pense que déjà, c'est une avenue intéressante.

Anne-Élisabeth : [00:18:20] Oui, mais s'autoréguler avec l'alcool, une réponse au stress, ce que j'entends ici, c'est que c'est pas une bonne idée nécessairement. D'associer décompresser, déjouer son stress par le petit verre de blanc, on ferait pas trop ça, hein?

Michelle : [00:18:35] Ah non, c'est vraiment un grand facteur de risque pour développer un trouble. Ce qu'on appelle un trouble lié à l'usage de l'alcool qui s'apparenterait à une dépendance un peu. Parce que, quand on utilise l'alcool pour réguler nos émotions et qu'on commence à en prendre l'habitude, quand les émotions reviennent, notre corps ou notre cerveau automatiquement recherche l'alcool. Et on va développer une certaine tolérance, alors on va en boire de plus en plus.

Anne-Élisabeth : [00:19:01] Bien sûr, pour rechercher l'effet qui va prendre de plus en plus de consommations avant d'apparaître. OK, oui je comprends.

Michelle : [00:19:06] Oui, c'est ça. Mais, j'ai même lu un fait scientifique intéressant qui est que l'alcool nous fait sécréter de la dopamine et puis toutes sortes d'hormones qui, à court terme, peut nous faire sentir mieux. Mais quand on en consomme, notre cerveau s'habitue à ne plus produire de dopamine par lui-même, parce qu'il se dit, bon, c'est l'alcool qui m'amène ma dopamine, donc il en sécrète moins par lui-même.

Anne-Élisabeth : [00:19:29] Ah mon Dieu! Ting!

Ariel : [00:19:32] Euréka.

Michelle : [00:19:29] Et voilà! Alors à long terme, ça peut contribuer à altérer notre santé mentale.

Anne-Élisabeth : [00:19:38] Et avoir un état dépressif?

Michelle : [00:19:40] Ça peut. Surtout chez des personnes qui peuvent avoir une prédisposition ou qui ont déjà eu des épisodes dépressifs. Donc, les effets varient grandement d'une personne à l'autre. Mais oui, ça peut venir jouer au niveau des hormones de notre cerveau. Puis éventuellement, on a besoin de l'alcool pour ressentir cette euphorie-là. Ça, c'est tout le cycle des dépendances, avec peu importe quoi. Le café, les drogues, la cigarette, le sport pour certaines personnes, le sexe pour d'autres. Puis je pense que maintenant que je suis en santé publique, qui est la branche de la médecine puis de la santé qui s'occupe de la santé des populations, je comprends à quel point la norme sociale est importante, essentielle pour tous nos comportements qui sont liés à notre santé.

Puis pour l'alcool, je pense qu'on s'en va vers là en en parlant de plus en plus, mais on a encore du chemin à faire. Parce qu'on a su, tsé avec la science qui a évolué, qu'il n'y a pas de dose sécuritaire. Quand on boit peu, on a un risque plus mince de développer un problème, mais le risque existe quand même. Puis plus on boit, plus le risque est élevé sur différentes formes de maladies. Mais ça, en effet, c'est pas pour diaboliser l'alcool. Mais, il faut savoir que quand on boit, bien, ça amène un certain risque à notre santé qui est plus ou moins grand. Mais si on décide de boire ou si on boit déjà, bien, j'aimais ce que vous parliez un petit peu plus tôt, on peut adopter des pratiques qui minimisent nos risques.

 

Anne-Élisabeth : [00:21:06] Qu'est-ce que tu penses de ces pratiques-là, d'un petit peu de se faire une petite jambette intérieure? Est-ce que c'est comme un peu un genre de placebo étrange ou tu sembles dire que c'est?

Michelle : [00:21:14] Une jambette dans quel sens?

Anne-Élisabeth : [00:21:15] Bien, je sais pas. Je me dis, je vais prendre du 7up avec la grenadine, ça me fait penser à un gin-tonic. Non, tu devrais vraiment pas prendre quelque chose qui ressemble à de l'alcool. Tsé, c'est un peu l'équivalent du TVG. Tu ne prends pas du Beyond meat. Tu t'arrêtes, tu défais ton rapport à ça, tu te fais pas des… tu comprends-tu?

Ariel : [00:21:29] Ça, c’est-tu une morale? Tsé, dans le sens…

Anne-Élisabeth : [00:21:30] Mais c’est ça, Je me questionne, moi j'ai pas…

Michelle : [00:21:33] Écoute, ce serait difficile pour moi de me prononcer là-dessus.

Anne-Élisabeth : [00:21:35] Je comprends. Oui, oui, c'est personnel, là.

Michelle : [00:21:36] Mais, je sais que toutes les actions qu'on prend pour nous-mêmes, qui fonctionnent pour nous, pour diminuer un peu notre consommation d'alcool, peu importe où est-ce qu’on en était, pour arrêter de boire si c’est ce que la personne souhaite, c'est efficace. Donc si ça c'est une mesure que tu sais que tu vas être capable de suivre et qui t'aide, une fois de temps en temps, à remplacer une boisson alcoolisée par une boisson non alcoolisée parce que ça goûte semblable, bien, c'est un cadeau pour ta santé.

Anne-Élisabeth : [00:22:03] Bien oui, c'est vrai. C'est de même qu'il faut le voir.

Michelle : [00:22:05] Fait que peu importe ensuite. Au niveau de la psychologie, comment ton cerveau l'interprète, est-ce que tu as plus de risques de retomber dans l'alcool? Peut-être. Je suis pas certaine de ça.

Anne-Élisabeth : [00:22:16] Mais, je sais que tu as une expertise quand même. J'aimerais que tu m'expliques le hangover de manière technique. Est-ce que tu as la réponse à pourquoi on se sent si croche le lendemain d'une brosse?

Michelle : [00:22:26] La science est encore en train d'évoluer là-dessus, parce que c'est assez difficile de documenter exactement ce qui se passe dans notre corps, mais c'est assez fascinant. Je suis allée lire ça. Ça nous aide à comprendre notre corps et ça nous aide à comprendre des techniques pour l'éviter, si jamais. Bien, je vais mettre la base. Le truc pour l'éviter, c'est de pas boire ou de boire avec modération, parce que c'est le surplus d'alcool ou, disons en fait, c'est l'intoxication d'alcool dans notre corps qui mène, qu'on dit, au lendemain de veille ou hangover. Alors quand on boit, l'alcool joue beaucoup au niveau de notre cerveau, c'est pour ça que ça nous désinhibe, on perd l'équilibre et tout ça notamment. Mais quand ça va jouer sur notre cerveau, ça va altérer un des mécanismes de notre corps, une glande dans notre cerveau qui régule la quantité de volume de sang qui va jouer au niveau des reins. Fait que c'est nos reins dans notre corps qui réabsorbent du liquide, puis qui va nous faire faire pipi si on est déshydraté ou qui libère beaucoup de liquides pour nous faire faire beaucoup pipi, si on a bu beaucoup d'eau, puis on a beaucoup de volume.

Bref, notre corps est très bien fait pour nous permettre de ne pas être déshydraté ou de contrôler la quantité de volume qu'on boit. Mais l'alcool, ça vient altérer ça. Donc, notre rein va se mettre à excréter plus de liquide qu’il devrait, et là, on va perdre trop de liquide, puis on va se déshydrater. Tout ça pour en venir au fait que la déshydratation va venir donner des maux de tête.

 

Anne-Élisabeth : [00:23:56] Terribles. Mais, de là le conseil de boire toujours une consommation, un verre d'eau, une consommation, un verre d'eau. Parce que c'est ça, c'est la déshydratation qui donne ces fameux maux de tête épouvantables.

Michelle : [00:24:04] Exactement. Puis c'est important aussi de manger, de pas boire à jeun. D'ailleurs, j'ai eu une seule expérience de lendemain de veille et c'est parce que j'étais après un examen, j'avais pas mangé de la journée. Mais là, je comprends pourquoi. C'est parce que le foie stocke, le foie est responsable de produire du sucre quand on en manque dans notre corps. Quand on boit beaucoup d'alcool, l'alcool est métabolisé dans notre foie, alors notre foie est complètement occupé à.

Anne-Élisabeth : [00:24:32] Gérer l'alcool, à.

Michelle : [00:24:33] Gérer l’alcool.

Anne-Élisabeth : [00:24:34] Fait qu'il envoie plus du sucre dans notre corps.

Michelle : [00:24:35] Exactement. Donc là, on est un peu…

Anne-Élisabeth : [00:24:37] Qu’est-ce que ça fait, quand on n'a plus de sucre?

Michelle : [00:24:38] Bien, ça peut donner des maux de tête, des étourdissements, des palpitations, la sensation d'anxiété. Ça peut donner un mélange de tout ça. Ça fait que quand l'alcool rentre dans notre corps, il passe par le foie, puis le foie va essayer de se débarrasser de l'alcool parce que c'est pas une substance qu'on aime avoir naturellement dans notre corps. Et le foie transforme l'alcool en une substance chimique avec un nom super long, compliqué. Et cette substance-là, elle est toxique. Notre corps veut s'en débarrasser, donc on a mal au cœur, on vomit.

Anne-Élisabeth : [00:25:10] Ah oui, on veut que ça sorte.

Michelle : [00:25:11] Et là, ça contribue aussi au mal de tête. Bref, il y a toutes sortes de phénomènes qui se passent dans notre corps parce que notre corps veut se débarrasser de l'alcool.

Ariel : [00:25:18] Et d'ailleurs, les gens, ce que je ne comprendrai jamais là, qui vomissent et qui sont « je suis correct » et ça repart.

Anne-Élisabeth : [00:25:26] J'ai déjà fait ça.

Ariel : [00:25:27] Toi, ça te fait ça?

Anne-Élisabeth : [00:25:29] Une fois. Mais là j'avais, admettons, on va dire un 21 ans, journée internationale du théâtre, conservatoire. Un petit vomi dans les toilettes du vestiaire et puis c'est reparti pour un tour.

Ariel : [00:25:38] Mon Dieu, moi ça me…

Anne-Élisabeth : [00:25:39] Mais j'étais très jeune. C'est pas arrivé souvent. Mais oui, mais je comprends le principe de, oui, faire de l'espace pour d'autres poisons.

Michelle : [00:25:47] Oui. Je pense que d'écouter son corps, de savoir ce qui se passe dans notre corps quand on boit, ça peut être intéressant. Moi, ça m'aide à avoir de l'empathie pour mon corps. Parce que quand on a mal au cœur le lendemain, puis on est comme « coudonc, pourquoi je me sens mal comme ça? », mais c'est sa réaction normale, à notre corps, pour se protéger puis se débarrasser d'une substance plutôt toxique.

Anne-Élisabeth : [00:26:06] Mais j'aime cette image, de se sortir de notre corps et puis le voir comme quelque chose qu'on veut protéger. Quand même, ça me touche.

Michelle : [00:26:11] Notre petit corps là, bien oui.

Anne-Élisabeth : [00:26:13] Notre petit corps.

Michelle : [00:26:13] Voilà.

Anne-Élisabeth : [00:26:14] Oui, si on est pas capable de s'aimer, on pourrait peut-être essayer d'aimer notre corps au moins, le dissocier de.

Ariel : [00:26:19] On pourrait essayer ça.

Anne-Élisabeth : [00:26:20] Toujours un bon truc.

Ariel : [00:26:20] Puis j'avais su ou vu ou je sais pas si c'est réel, le lien héréditaire, une cause héréditaire? Ah oui, ça, ça a rapport?

Michelle : [00:26:31] Oui, la génétique. La génétique joue un rôle dans bien des choses. Mais c'est sûr que quelqu'un qui est né de parents, par exemple, qui ont eu un trouble lié à l'usage de l'alcool, on pourrait dire qu’ils étaient alcooliques, même si j'aime pas vraiment le mot, ont plus de risques d'eux-mêmes en souffrir. Donc, quand nos parents sont sujets à des dépendances quelconques, les enfants le sont aussi génétiquement. Puis des fois, c'est un lien aussi avec…

Anne-Élisabeth : [00:27:01] Social parce qu'il y en avait à la maison autour de la table, ça a été dédramatisé, dédouané vite. Mais aussi, au-delà de ça, parce qu'on le porte en dedans, là, au-delà même de…

Michelle : [00:27:11] Oui, oui, en effet.

Anne-Élisabeth : [00:27:13] , Oh mon Dieu. OK, je comprends.

Michelle : [00:27:13] Tout comme pour plusieurs comportements. Notre personnalité, comment je pourrais dire, notre propension à tomber dans certains comportements est, entre autres, dictés dans nos gènes. Mais, ça ne veut pas dire qu'on n'a pas le contrôle sur nous-même. Mais c'est normal que, pour certaines personnes, ce soit plus difficile, la consommation d'alcool. Il ne faut pas juger ça. Je pense qu'il faut le reconnaître.

Anne-Élisabeth : [00:27:40] Oui, vraiment oui.

Michelle : [00:27:40] Il faut savoir… Par exemple, moi à un certain point, je me suis dit je pense que je suis le genre de personne qui serait sujet à avoir des dépendances dans la vie. Je pense que j'en ai au café puis au chocolat, pour donner deux exemples, là.

Anne-Élisabeth : [00:27:56] Tu es sensible à certaines addictions?

Michelle : [00:27:58] Oui, parce que je carbure, moi, comment je pourrais dire, à l'adrénaline et aux stimuli externes. Ce qui fait que j'ai de la difficulté à générer de la motivation à l'interne sans qu'il y ait de l'aide externe. Comme par exemple, quand je n'ai pas le goût d'étudier, bien, je me prends un café. Des fois, je me prends des Skittles à côté. Je sais que je ne devrais pas, mais j'ai besoin de ce réconfort-là. Je sais que l'alcool pourrait m'amener ça.

Anne-Élisabeth : [00:28:26] C'est intéressant. Mais tu devrais… je te confirme que tu n'es pas la seule.

Michelle : [00:28:29] Ah, je le sais. C'est pour ça que j'en parle.

Anne-Élisabeth : [00:28:32] Mais bien sûr. Bien oui. Mais, pourquoi tu n'aimes pas le mot alcoolique? Qu'est-ce que tu n'aimes pas dans ce mot-là?

Michelle : [00:28:35] Bien en fait, je pense que c'est associé à une stigmatisation qu’on ne devrait pas avoir. Parce qu'il faut détacher un peu les comportements de la pure volonté. Je pense qu'il y a quelque chose des fois qui dépasse notre volonté. C’est-à-dire qu'on n'a pas choisi de grandir dans une famille où, par exemple, les gens buvaient de l'alcool juste parce qu'on parle d'alcool. Mais, on n'a pas choisi non plus d'être dans une société où c'est encouragé, presque, de boire de l'alcool. Donc c'est pour ça que, moi, j'aime la santé publique. Parce que moi, mon rôle, bien nous, notre rôle en santé publique, c'est d'amener des circonstances puis des environnements qui encouragent un certain comportement. Parce que nous en tant qu'individu – ça, je m'inclus là-dedans – on est influencé, c'est normal. Alors, je trouve que des mots comme alcoolique, ça donne toute, entre guillemets, « la responsabilité » à la personne, en la jugeant parfois. Alors que quelqu'un qui est vraiment alcoolique, c’est-à-dire qui a un trouble lié à l'usage de l'alcool, à ce moment-là est malade quand c'est vraiment une grande dépendance et a besoin d'aide. Puis, il y a une partie de ça qui est un peu hors de son contrôle. Tsé, la personne a souvent besoin d'assistance à ce point-là.

Ariel : [00:29:56] Puis même le lexique, là, tsé, une rechute, il y a quelque chose de super péjoratif, comme si c'était… je sais pas, il y a comme un…

Anne-Élisabeth : [00:30:05] La personne est faible, la personne n'a pas de volonté. Oui.

Ariel : [00:30:08] Oui, elle a échoué.

Anne-Élisabeth : [00:30:10] Alors que, comme tu dis, elle a pas choisi d'évoluer dans cette société-là, elle a pas choisi les traumas qu'elle a vécus, elle a pas choisi les parents qu'elle a eus. Puis c'est vrai que l'imputer de tout le shame entouré de ce mot-là, je ne pense pas que ça va donner un bon boost à personne pour essayer de prendre sa consommation en main.

Michelle : [00:30:23] Oui, oui. Puis je pense que c'est encore… c'est difficile peut-être pour les personnes qui ont un trouble lié à l'usage de l'alcool parce qu'ils sont dans une société, je pense que vous en parliez peut-être, mais une société où beaucoup de gens consomment de l'alcool, donc une personne qui essaie d'arrêter est constamment exposée à l'alcool.

Anne-Élisabeth : [00:30:41] Un cinq à sept de job, un meeting, un brunch, un shower. Il y a tellement d'occasions, justement, où refuser peut avoir l'air weird.

Ariel : [00:30:49] Puis, est-ce que tu aurais des conseils généraux à nous donner?

Michelle : [00:30:53] J'ai l'air d'être la messie qui va vous guider, mais…

Anne-Élisabeth : [00:30:55] Mais non, mais en tant que spécialiste, je veux dire, c'est vraiment juste de par ton titre.

Michelle : [00:30:59] La scientifique en moi…

Anne-Élisabeth : [00:30:59] Oui, c'est ça.

Michelle : [00:31:00] … dirait : Sachez qu'il y a pas de dose sécuritaire et que ça peut comporter des risques, de consommer de l'alcool. Dans un monde idéal, on n’en consommerait pas. Ce que je vous dirais, c'est que si vous en consommez déjà, toutes les petites actions pour réduire soit le nombre de jours où on consomme, le nombre de verres quand on en consomme, le pourcentage d'alcool dans nos consommations, le mieux. Le mieux. Donc des fois, on peut se dire, bien, je sais que, moi, je veux pas arrêter, mais je peux sauter un jour ou je peux, tsé, réduire d'une consommation. Tsé, le binge drinking a beaucoup d'effet sur la santé, notamment pour le lendemain de veille, mais aussi, quand on accumule les séances, si je pourrais dire, de binge drinking, ça peut causer les mêmes effets à la santé que de boire, disons, deux verres par jour, mais à tous les jours pendant sa vie, disons.

Anne-Élisabeth : [00:31:54] Ah oui. Tu veux dire de se protéger un peu narcissiquement, en disant : moi, je bois juste le vendredi. Mais le vendredi, tu en…

Ariel : [00:32:01] Ça y va, là.

Anne-Élisabeth : [00:32 :02] Oui, c’est ça, ça sera pas mieux à long terme que quelqu'un qui se prend son verre de blanc tous les jours, là.

Michelle : [00:32:07] Pas vraiment. En plus, ça amène beaucoup plus de risques au niveau des accidents, des traumas, un accident de la route, tout ça, là. Mais en effet, si on veut diminuer, ce que je pense qu'on pourrait faire, il faut diminuer le nombre de jours dans une semaine ou dans un mois où on boit, et le nombre de consommations dans une même séance.

Anne-Élisabeth : [00:32:26] Oui, oui, tout ça jumelé ensemble, là.

Michelle : [00:32:28] Ce que j'aimerais dire à la fin, c'est que si on sait qu'on va boire beaucoup, par exemple, là on tombe dans un peu une réduction des méfaits, là. Tsé, ne jamais, jamais conduire quand on a bu de l'alcool ou si on a le moindre doute.

Anne-Élisabeth : [00:32:41] Important.

Michelle : [00:32:42] Ne pas boire si on essaie de devenir enceinte. Puis, comme on l'a dit tantôt, alterner une boisson alcoolisée, une boisson non alcoolisée, manger en même temps, puis prendre soin les uns des autres. Parce que des conversations, comme on a aujourd'hui, je trouve ça tellement sain. Si tous les groupes d'amis pouvaient avoir des conversations comme ça. C'est quoi ton rapport à l'alcool? C'est quoi tes objectifs par rapport à l'alcool cette année? Ou dans la soirée cette semaine, qu'est-ce que tu aimerais faire ou ne pas faire? Tsé, veiller les uns sur les autres, je pense.

Ariel : [00:33:10] Avoir des alliés aussi dans ta veillée, tsé. Tsé eille, pas guette-moi, mais tsé...

Anne-Élisabeth : [00:33:16] Bien, pourquoi pas? Protège-moi de moi-même. Des fois, on a besoin de ça.

Michelle : [00:33:18] Ou des autres, hein. Parce que l'alcool, ça désinhibe. Et malheureusement, beaucoup de violence ou de violence sexuelle qui est associée à l'alcool. Donc, il faut qu'on fasse attention à nous.

Anne-Élisabeth : [00:33:30] Veillons les uns sur les autres. Je trouve tellement que ça, oui, c’est ça. Ça dit tout pour moi. Puis merci d'en avoir parlé avec autant d'humanité. Puis merci d'avoir parlé de ton expérience personnelle.

Michelle : [00:33:41] Merci à vous aussi.

Anne-Élisabeth : [00:33:41] Aussi bien que, tsé, tu es là à titre de médecin, mais tu es un être humain d'abord et avant tout. Puis nous, c'est ça, nous aussi, en plus d'être comédiennes, on a des discussions par rapport à l'alcool, puis j'espère que ça a inspiré des gens. En terminant, Ariel, est-ce qu'il y a quelqu'un que tu aimerais remercier? On demande ça à notre invité.

Ariel : [00:33:55] Bien, mon Dieu. Je pourrais remercier mon chum, je pense.

Anne-Élisabeth : [00:34:01] Oui?

Ariel : [00:34:02] Qui a été là à titre d'allié, justement. Puis que j'ai connu dans un moment de ma vie où j'étais en plein dedans, là, où c'était pas facile pour lui aussi de me voir m'autoflageller, m'autofaire violence. Fait que je pense que ça peut être aussi bien souffrant pour l'entourage – on en parlait là – puis qui m'a vu aussi prendre la responsabilité de me sortir de ça, en quelque sorte. Puis, je pense que ça bénéficie aux deux, à notre relation également. Donc merci mon chum.

Anne-Élisabeth : [00:34:32] Merci les filles.

[transition – texte à l’écran]

[00:34:37] 3 questions pour mieux comprendre votre rapport à l’alcool

[00:34:40] 1. À quelle fréquence buvez-vous de l’alcool?
2. Sentez-vous parfois une pression sociale pour boire?
3. L’alcool nuit-il à vos relations?

[00:34:47] Trouvez plus de conseils sur beneva.ca

[générique]

FIN DE TRANSCRIPTION

Anne-Élisabeth Bossé reçoit Ariel Charest, qui raconte pourquoi et comment elle a pris la décision de revoir sa relation avec les boissons alcoolisées. Puis, Michelle Houde vient expliquer les effets de celles-ci sur le corps et suggère des pratiques à adopter pour rester en santé. Ce trio pétillant nous invite à une réflexion personnelle et collective sur notre consommation.

Animation : Anne-Élisabeth Bossé

Invitées : Ariel Charest et Michelle Houde

Ressources :

Alcool : les mythes démystifiés (Cet hyperlien s'ouvrira dans un nouvel onglet).

Directives de consommation d’alcool à faible risque au Canada (Cet hyperlien s'ouvrira dans un nouvel onglet).

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