Proches aidants: comment épauler une personne âgée en dépression
Mine basse. Énergie à plat. Perte d’appétit. Insomnie.
À partir de quel moment faut-il s’inquiéter de cette tristesse chez la personne âgée dont vous prenez soin? Comment savoir si le vague à l’âme ne cache pas plutôt un état dépressif?
On parle souvent de LA dépression au singulier, alors qu’elle se décline en plusieurs types :
- dépression majeure
- trouble dépressif persistant (dure depuis plus de 2 ans)
- trouble du deuil prolongé (causé par un événement spécifique contrairement à la dépression majeure)
- dépression saisonnière
Pour les besoins de cet article, nous nous concentrerons sur la dépression majeure qui fait partie des troubles dépressifs. Mais surtout, nous vous proposerons des solutions pour vous épauler dans votre rôle de proche aidant ou aidante.
Quels sont les signes de la dépression?
Chacun de nous peut vivre des sentiments de tristesse, de lassitude et d’abattement au quotidien. Ils se manifestent par vagues, où les bonnes journées et les mauvaises se côtoient, au gré des événements.
C’est lorsque les idées sombres perdurent que l’on peut soupçonner une dépression. Portez attention aux signes qui ne mentent pas :
- La personne ne s’habille pas ou néglige son hygiène.
- Elle ne répond pas au téléphone et à la porte.
- Son humeur a changé : pleurs, agitation, colère ou encore absence complète d’émotions.
- Elle parle moins que d’habitude et ses réponses restent vagues.
- Elle vous appelle plus souvent pour se plaindre (souvent de sa douleur) ou vous faire part de ses exigences démesurées.
- Sa mémoire semble faire défaut et elle éprouve de la difficulté à se concentrer.
- Elle accomplit rarement les tâches qu’elle doit faire.
Ces comportements sont précurseurs d’un diagnostic de dépression. Pour qu’il devienne officiel, au moins 5 des symptômes suivants doivent se manifester presque tous les jours, pendant 2 semaines. De plus, l’un d’eux doit être une humeur dépressive ou la perte d’intérêt ou de plaisir.
Ces symptômes ne doivent pas s’expliquer par les effets secondaires d’un médicament ou d’une autre maladie.
Un cas concret
Depuis quelques semaines, Juliette éprouve beaucoup de difficulté à s’endormir et se réveille à plusieurs reprises au cours de la nuit. La fatigue s’accumule et elle se sent dépassée par les événements.
Côté appétit, elle se force à finir son assiette et a perdu du poids.
Autrefois très active, elle peine à sortir du lit et à accomplir les tâches quotidiennes. Elle est envahie par la tristesse. Elle pense qu’il serait préférable de mourir, mais n’a pas élaboré de plan de suicide.
Elle cherche à savoir pourquoi elle a l’impression de ne plus se reconnaître.
Comme elle ne peut s’expliquer son abattement, elle consulte sa médecin. Cette dernière lui diagnostique une dépression majeure et lui prescrit des antidépresseurs. Elle lui recommande aussi d’entreprendre une psychothérapie et de se joindre au groupe de soutien de son quartier.
Depuis, Juliette va de mieux en mieux.
Quels sont les facteurs de risque?
Qu’est-ce qui entraîne une dépression? Pointer vers une cause précise est impossible, car c’est souvent une combinaison de facteurs qui déclenche l’apparition des symptômes :
- l’hérédité
- le fait d’avoir déjà souffert d’une dépression
- certaines maladies (cancer, accident vasculaire cérébral, arthrite, maladie de Parkinson, troubles anxieux, etc.)
- le stress chronique
- l’isolement, la solitude et la perte du soutien social
- des deuils à répétition (décès d’un être cher, perte d’autonomie, etc.)
- les carences nutritionnelles, comme la vitamine B12 chez les personnes âgées
- la précarité financière
- la consommation d’alcool, de drogues ou de certains médicaments
Chose certaine, la dépression n’exerce pas de discrimination : elle frappe les gens de tous âges.
On remarque toutefois que cette maladie touche 20% à 25% des personnes hospitalisées et 10% à 40% de celles qui habitent dans un centre d’hébergement. Celles qui vivent encore dans leur demeure semblent mieux « protégées » contre la maladie.
Quand consulter?
Il faut consulter des professionnels de la santé (médecin et psychologue) si ces 2 conditions sont réunies :
- Les symptômes de dépression perturbent le quotidien de la personne.
- La personne souffre de détresse .
Les aînés dépressifs demandent rarement de l’aide de leur propre chef. C’est pourquoi vous devez organiser une consultation médicale, quitte à insister, si vous le jugez nécessaire.
Mise en garde
Il est préférable de faire appel aux professionnels de la santé, tant pour le diagnostic que pour le traitement de la dépression.
Comment agir avec une personne âgée déprimée?
Les personnes aux prises avec la dépression ressentent de la culpabilité et de la honte qui les poussent à cacher leur état et leurs sentiments. La crainte des préjugés les freine. Elles vont même s’isoler des gens qu’elles aimaient autrefois côtoyer.
Allez au-delà des émotions et de la détresse psychologique. Parfois, un discours rempli d’énumération de symptômes physiques peut masquer une dépression.
Vous devrez peut-être percer la carapace de votre proche.
La confiance est le mot d’ordre pour créer un climat propice aux confidences de la personne âgée dépressive. Sans elle, vous aurez l’impression de ramer à contresens.
De votre côté, vous devez démontrer de la patience et de la bienveillance. Quant à votre proche, il ou elle doit faire preuve de courage pour demander de l’aide.
Planifiez des visites afin de réduire son isolement et sa solitude. Développez un projet commun, soit du jardinage ou une sortie spéciale.
Réservez des moments pour parler calmement à 2. Pour favoriser la discussion, posez des questions ouvertes. Écoutez la personne sans jugement. Évitez de comparer sa situation à celles d’autres gens qui ont souffert de dépression.
Tentez de trouver l’équilibre entre l’optimisme et la réalité un peu moins rose. Oui, cette situation s’avère difficile à affronter, mais des solutions sont à la portée de votre proche. Soulignez les améliorations et les bons points depuis votre dernière visite. Le tableau semble noir en ce moment, mais les couleurs reviendront de jour en jour.
Quels sont les traitements contre la dépression?
Plus tôt une dépression est diagnostiquée, plus il devient facile d’intervenir et de mettre en place un plan de traitement.
À l’inverse, une dépression non traitée peut durer pendant des mois, parfois même des années.
Chose certaine, la personne dépressive ne guérit pas d’elle-même. Mieux vaut ne pas prendre cette maladie à la légère. Quand on ne la traite pas, elle représente la principale cause de suicide chez les personnes âgées.
La dépression augmente de 2 à 3 fois le risque de décès chez les personnes âgées. Elle aggrave leurs capacités fonctionnelles et mène à un déclin plus important de la condition physique et cognitive.
Les thérapies reconnues
La thérapie cognitivo-comportementale et celle de la résolution de problèmes, en présentiel ou en mode virtuel, sont efficaces chez les aînés. Elles reposent sur des stratégies qui permettent à la personne de modifier ses pensées et ses comportements et ainsi de mieux s’adapter aux difficultés.
Malgré son efficacité, 2 ingrédients s’avèrent essentiels : le lien de confiance développé avec le ou la thérapeute et la résilience de votre proche.
On recommande cette psychothérapie pour traiter une dépression légère à modérée.
Les antidépresseurs à la rescousse
Les antidépresseurs combinés à une thérapie cognitivo-comportementale sont jugés efficaces pour traiter la dépression majeure.
Plusieurs familles de médicaments contre la dépression sont offertes sur le marché. Ils doivent être prescrits par des médecins. Une prise de sang pourrait être nécessaire avant de les prescrire ou de vérifier leur efficacité.
Un suivi médical aux 2 semaines permet de vérifier l’efficacité des antidépresseurs, leurs effets secondaires et le risque suicidaire. Les résultats peuvent prendre jusqu’à 12 semaines avant de se manifester.
Le dosage du médicament pourrait être modifié au besoin.
Dans certains cas, d’autres médicaments pourraient être prescrits, et une thérapie pourrait être recommandée. Chaque cas est unique.
L’arrêt de la médication doit être planifié avec les professionnels de la santé. Il se fait de manière graduelle avec des doses décroissantes.
La sismothérapie, une thérapie qui gagne à être connue
La sismothérapie consiste à envoyer un courant électrique dans le cerveau, ce qui provoque une crise convulsive. Elle se pratique sous anesthésie générale.
Elle connaît une certaine efficacité chez les personnes âgées qui souffrent de dépression et dont la combinaison antidépresseurs-thérapie ne fonctionne pas. On l’utilise aussi quand…
- Le risque suicidaire est très élevé.
- La personne âgée souffre d’une maladie physique grave.
- La personne présente des symptômes psychotiques.
Comment se faire du bien au quotidien
Les symptômes de la dépression majeure deviennent parfois si sévères que la personne est incapable de se sortir du lit.
Maintenir la routine
Malgré la dépression, la routine est essentielle. Elle permet d’oublier les difficultés et de se reconstruire une journée à la fois.
Il suffit de quelques gestes pour que votre proche adopte de saines habitudes de vie :
- manger des repas équilibrés
- dormir au moins 7 heures par nuit
- sortir dehors tous les jours pour s’exposer à la lumière naturelle
- voir des gens pour briser l’isolement
- éviter l’alcool
- savourer chaque petite victoire
- réduire ses attentes et faire preuve d’indulgence envers soi
Briser l’isolement
Pas facile de briser l’isolement dans lequel s’enlisent les personnes qui souffrent de dépression…
Vérifiez auprès de votre proche ce qu’elle a envie de faire et qui lui ferait du bien :
- bénévolat
- activités avec des amis
- promenades dans la nature
- film au cinéma du quartier
- groupe de soutien
- découverte d’un nouveau passe-temps
- etc.
Accompagnez-la pendant ces moments de détente. Votre contact et votre soutien demeurent des sources de réconfort et favorisent la guérison.
Les 1 000 vertus de l’activité physique
L’activité physique agit comme un baume sur le corps… et l’esprit. Elle protège les personnes âgées contre la dépression. Elle permet au cerveau de libérer de la dopamine et la sérotonine, 2 hormones aux vertus antidépression. Elle fait aussi chuter le taux de cortisol, l’hormone du stress.
Les effets de bouger se font également sentir dans l’augmentation de la sécrétion d’endorphines. Celles-ci procurent un sentiment de bien-être et coupent les sensations de douleur. Ainsi, la personne active ressent qu’elle exerce un contrôle sur sa vie.
Finalement, l’activité physique améliore la qualité du sommeil.
L’ici et maintenant de la méditation
Pour éviter de ruminer le passé et d’entrevoir le pire pour le futur, la méditation est conseillée, particulièrement celle de la pleine conscience. D’autres disciplines, comme le yoga, le taï-chi et le qi gong, se montrent aussi efficaces.
Méditer permet de se concentrer sur la seule chose sur laquelle nous avons vraiment du pouvoir : le moment présent.
Quelques minutes quotidiennes suffisent pour apporter un sentiment de calme et de sérénité.
Certaines recherches vont même jusqu’à affirmer que la méditation réduit les symptômes de la dépression.
Le temps fait bien les choses
Voir l’un ou l’une de ses proches souffrir n’est jamais facile. Le sentiment d’impuissance peut vous envahir face à la dépression.
Et pourtant, votre présence et votre appui sont un gage de succès pour aider votre proche. Créez un cercle de soutien qui comprend les personnes qu’elle apprécie, la communauté et des professionnels de la santé pour l’épauler.